vendredi 22 novembre 2013

Transformer la fonction finance

En fin 2011 j’ai publié un point de vue sur la transformation de la fonction finance ; j’abordais alors ce thème par le prisme de ce qui était attendu de cette fonction par rapport à son positionnement, son rôle dans l’entreprise.

Le présent article ne vise pas à synthétiser ce point de vue ; il focalise sur des points plus importants aujourd’hui qu’à l’époque et bénéficie des résultats d’études menées par de grands cabinets de conseil sur le sujet.


La fonction finance a connu ces dernières années une profonde mutation, du fait d’un contexte règlementaire plus fort, d’une situation économique exceptionnelle et d’attentes accrues de ses clients internes que sont les décideurs opérationnels

Cette fonction finance peut être résumée en trois rôles, nullement antinomiques :
  • Le fournisseur qui produit des documents et des données à destination des autorités règlementaires dans une vue qualifiée de déclarative (l’image classique de la comptabilité). A ces données et documents s’ajoutent des indicateurs et tableaux de bord dans une vue plutôt analytique. Son horizon est plutôt celui du court terme.
  • Le conseiller qui  se détache de la comptabilité et prend en compte de manière plus forte le métier (offre, demande, concurrence, moyens, innovation, environnement …) de l’entreprise et ajoute une dimension prospective aux activités et livrables de la fonction finance. Son horizon est le moyen terme.
  • Le partenaire qui lui s’étend à la dimension stratégique du management (de l’élaboration à la mise en œuvre du plan stratégique) et permet de se projeter dans l’horizon à long terme que représente le futur de l’entreprise.






Pour une entreprise donnée, le rôle de la fonction finance peut être celui de fournisseur, de conseiller et de partenaire, avec des mineures et une majeure. Selon son degré de maturité sur la question ou de par la position personnelle du directeur administratif et financier (DAF) dans le collège managérial, une entreprise peut vivre la fonction finance sur un rôle majeur et viser, par un programme de transformation, à la faire changer de rôle. C’est d’ailleurs tout le débat qui agite les cabinets de conseil en management autour du leitmotiv où le DAF doit être absolument positionné comme ‘business partner’ dans l’entreprise.

Nous ne débattrons donc pas ici de la pertinence de ce dernier positionnement mais plutôt de comment changer la fonction finance de rôle, dans le respect des attentes qu’en a le management général de l’entreprise.

Il s’agit essentiellement pour les acteurs de cette fonction de prendre conscience des enjeux d’une telle transformation, d’en comprendre l’objectif, de l’accepter, de s’impliquer et de la pérenniser par un engagement fort.






Cette démarche suit cinq phases successives ; au diagnostic de l’existant (1) va succéder une analyse d’impacts (2) puis la définition de la transformation (3), son organisation (4) et enfin son déploiement sur les populations concernées. Toutes ces phases sont conjointement conduites sous les axes procéduraux (comment), managériaux (pourquoi) et humains (qui).





  • La phase de diagnostic :

Cette première phase consiste à établir un état des lieux de  la fonction finance afin d’identifier les axes d’amélioration et de documenter l’écart à la cible. Elle est constituée d’analyse des documents internes existant, d’entretiens individuels et collectifs ; son livrable est un rapport de diagnostic.

  • La phase d’analyse d’impacts :

Cette deuxième phase vise à qualifier l’impact qu’ont les projets de transformation en cours sur la fonction finance-gestion et d’évaluer les adaptations à réaliser pour la mettre à niveau. Cette analyse d’impacts se déroule par des entretiens individuels (le management) et collectifs (l’équipe). Son livrable le plus représentatif est la matrice d’impact permettant de visualiser rapidement la nature et la profondeur de l’impact. Il s’agit d’une représentation graphique dans laquelle sont qualifiés et placés les différents changements identifiés. L’objectif étant de déterminer les populations les plus impactées, et donc nécessitant une attention particulière.

  • La phase de définition de la transformation :

C’est au cours de cette phase que sont définis la cible et les attendus de cette transformation, les vecteurs qu’elle va mobiliser tout en appréciant l’impact qu’elle aura sur les collaborateurs concernés. La méthode utilisée s’appuie sur quelques concepts (acteur, produit, client, ressource) définissant le mode opératoire dans un processus collaboratif classique. Dans un mode de travail collaboratif comme celui que vise la transformation de la fonction finance, il est indispensable de partager le même référentiel de collaboration. La méthode utilisée, basée sur des entretiens individuels et surtout collectifs (puisqu’il s’agit d’appropriation et de partage de références communes), permet ce partage. Elle s’appuie sur l’animation de groupes de travail dont le but est de conserver la capacité d’échange et d’effet miroir.
Cette phase est complétée par une nouvelle version de l’analyse d’impacts afin de définir ultérieurement la trajectoire de la transformation.

  • La phase d’organisation de la transformation :

Cette phase vise à définir la stratégie de transformation. Elle prend en compte les contraintes et les opportunités, précise les compétences et moyens à mobiliser, valide les vecteurs les plus efficaces. Elle permet de construire une trajectoire réaliste et progressive. Elle se base sur l’analyse d’impacts finalisée lors de la phase précédente.
Cette phase se traduit par un plan d’accompagnement, lui-même composé de trois livrables distincts. 1/ le plan de formation qui vise à professionnaliser les équipes et en favoriser l’apprentissage, nécessite de définir comment et avec quels vecteurs instaurer ce langage et ces références communes. 2/ le plan d’assistance qui, une fois la transformation lancée, consiste à ne pas laisser les équipes sans appui dans le but d’éviter de revenir à des pratiques antérieures quand le changement est trop long à intégrer. 3/ la planification du programme de transformation, en particulier des actions de communication permet enfin de donner de la visibilité à tous les niveaux de management.

  • La phase de déploiement de la transformation :

Ce qui est important dans cette phase, c’est essentiellement de ne pas oublier qu’un programme de transformation doit être suivi et mesuré, en continu. Un plan d’accompagnement est toujours sujet à des ajustements. Ce ne sont pas tant les raisons d’ajuster le plan d’accompagnement qui importent, il s’agit plutôt de se doter des procédures de suivi qui permettent de qualifier ces ajustements et de les traduire en plan d’actions. Ce suivi contribue à conserver le cap de la transformation.


Thierry Biyoghé